“Chez Titis”, la cuisine péi à bon porc

Une recommandation nous incite à visiter ce nouveau restaurant du centre ville de Cilaos, “Chez Titis ”. Nous sommes curieux de voir ce que donne cette échine aux lentilles de Cilaos qu’on nous a décrit avec des détails à nous humecter babines et moustaches.

Pour rappel, nos dernières visites culinaires dans le cirque s’étaient soldées par une critique positive du restaurant La Marmite du Cap, posé à l’entrée de l’agglomération, et un “voyage” de coup de chabouk trempé dans le vinaigre pour quelques autres. Suite à quoi il nous a été remonté la complainte hélas monnaie courante du restaurateur en mal de personnel qualifié, et motivé, que ce soit en cuisine ou en salle.

Nous avons réservé, mais était-ce bien nécessaire ? On est en semaine, la salle est grande. Nous comptons une soixantaine de couverts environ, avec de l’espace pour éviter de comprendre la teneur de la conversation à la table voisine. La décoration est sobre, presque minimaliste. Les lieux étaient occupés auparavant par un magasin de cycles. Des coups de pédales restent à donner pour rendre tout ça plus accueillant et chaleureux.
L’accueil est souriant. Le service l’est tout autant. Et, contrairement à notre complice qui a failli prendre racine sur sa chaise, notre attente s’avère normale. Pendant les “coups de feu” des week-ends, la chanson pourrait donc être différente.
Trois plats sont à emporter : cari porc ti pois, cari thon massalé et saucisses bringelles. Ceux là ne feront pas long feu. À la carte : quatre plats avec des lentilles de Cilaos, quatre autres créolités dont deux réalisées au vin blanc, de Cilaos itou, plus un bol renversé.

Nous souhaitons tenter le civet de pied de porc fumé au vin blanc, mais à condition que ce dernier soit le vin blanc sec du chai. Ce à quoi on nous répond par la négative. Aujourd’hui, c’est du vin traditionnel. Donc sucré. Donc non. Un civet la patte nous tente, pas un plat aux notes sucrées salées qui tutoient la sarcive. Heureusement que nous avons bien insisté sur ce point. Une expérience récente du côté du Sud nous a montré que des chefs ou restaurateurs négligent certains détails à la rédaction de leurs cartes et menus, ce qui peut être source pour le client de déconvenues.
Nous nous rabattons donc vers un rougail zandouillette, et la fameuse échine. Si nous nous rapportons au ticket de caisse, le restaurant constitue l’émanation d’une charcuterie, valorisant donc les produits de cette dernière. L’exigence concernant la viande est conséquemment plus grande. Elle sera satisfaite.

En effet, la côte d’échine qui trempe dans les lentilles est tout à fait fondante, sans sécheresse sous la dent, en long, en large ou en travers. Le fumé et son fumet nous titille les narines avant de nous caresser le palais. C’est un petit peu sauvage, comme les réminiscences d’un bon cochon des campagnes, nourri au conflore, grillé sur feu de bois (ce qui, sauf erreur, n’est pas le cas). Le gras est présent, mais très raisonnable. Les lentilles, fort goûteuses aussi, accompagnent parfaitement la viande avec leurs notes végétales et minérales qui les distinguent des lentilles communes. Tout cela eut été parfait si le sel s’était montré moins vantard, particulièrement dans les lentilles.

Côté andouillettes, le sel se fait légèrement plus discret, affichant assez de muscles tout de même pour taper dans le dos de cette charcutaille aux morceaux hétéroclites concernant la texture. Dans l’ensemble, nous avons quand même suffisamment de mordant pour avoir du plaisir. Le gras, présent, n’est pas pour autant “ragoulant”, et l’assaisonnement en thym et poivre est assez puissant pour nous chauffer les papilles. Nous déplorons toutefois un manque de croquant qu’auraient pu offrir des morceaux plus cartilagineux. Ou alors ils ont été trop moulus.
La saveur générale est bien moins musquée que ce à quoi nous nous attendions, mais autorise quand même une appréciation positive.

Le riz, de son côté, est correctement cuit, mais quelques grains nous ont semblé encore durs. Un dessus de marmite sans doute. Les haricots sont parfumés, mais la sauce aurait gagné à une réduction plus poussée. Le rougail zoignons, teinté de piments rouges, pour sa part, est indigent. C’est fort, et c’est tout. Le goût passe à la trappe. Certes les fruits et légumes sont rares et chers en ce moment, mais un rougail tomate arbuste (ou bringelle) aurait mieux passé avec ces plats.

Nous terminons avec une coupe de glace et un moelleux au chocolat, servi chaud et fondant, des délices à confesser pour faire baver le curé. Nous repartons après règlement d’une note de 56 euros pour deux boissons, deux plats de résistance et deux desserts. Le rapport qualité/prix est correct.

Quand nous faisons chauffer le clavier pour décrire la visite d’un établissement qui vient d’ouvrir, ce n’est pas pour le fouetter, quand bien même y aurait-il matière. En général on attend un peu que la machine ait trouvé son rythme de croisière avant de sortir le chabouk sus mentionné. Chez Titis, en l’occurrence, c’est plutôt bon. Les charcuteries sont d’excellente facture en tout cas. On pourrait, ici et là, relever des petites faiblesses. Cela manque de légumes frais notamment, mais les conditions actuelles l’expliquent peut-être. Si, en revanche, c’est habituel, il est bon de conseiller d’adjoindre à la charcuterie des accompagnements en salade verte (ou achards, choux, brèdes), histoire d’alléger un peu tout ça, comme cela semble être déjà le cas avec les grillades.
Nous suivrons donc l’exemple de notre complice passé en éclaireur en vous recommandant Chez Titis, étant entendu que nous y avons déjeuné en semaine, et que la salle était loin d’être pleine.
Bon appétit.

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